A propos du 11 Novembre, Armistice de la Première Guerre Mondiale dans laquelle les niçois furent entrainés
Ecrit par Julien Llinarès le 17 nov, 2019 dans la rubrique Dossiers / Doussié | 1 commentaire
Annexé en 1860, notre pays niçois se verra entrainé dans les grandes boucheries du XX° siècle.
Malgré le rejet massif de cette appartenance au pays voisin en 1871 à l’occasion des élections législatives françaises (élections qui seront annulées, fait unique et sans précédent dans l’histoire de la république française, au prétexte que le résultat allait à l’encontre de la volonté du pouvoir), les jeunes niçois seront enrôlés en masse dans les armées de la république pour servir de chair à canon dans des guerres fratricides.
Ernest Hemingway qui participa à cette guerre, en tant que volontaire américain, engagé comme ambulancier dans l’armée italienne disait :
« Je n’ai jamais aimé les mots de « gloire » ou de « sacrifice », les sacrifices ici ressemblaient aux abattoirs de Chicago avec cette différence que la viande servait à être enterrée. Il y avait beaucoup de mots qu’on ne pouvait plus tolérer comme « gloire », « honneur », « courage » devenus indécents ».
Depuis plusieurs jours déjà, mais encore plus aujourd’hui 11 novembre, nous voyons fleurir sur les réseaux sociaux des messages au sujet de 14/18 avec l’emploi de mots complètement galvaudés, « indécents » comme le dirait Hemingway, il y en a d’autres que je rajouterai comme « ils sont morts pour notre liberté ». Non ! Ils ne sont pas morts pour la liberté ! Les enjeux de la Première Guerre mondiale n’étaient pas les enjeux la Seconde. « 14/18 » n’étaient pas une lutte manichéenne du bien contre le mal, d’une guerre de la démocratie contre le totalitarisme, de la civilisation contre l’obscurantisme.
14/18 ce n’était pas les « gentils » gaulois d’un côté et les « méchants » germains de l’autre. C’était seulement de pauvres bougres arrachés à leurs usines et à leurs champs, envoyés se battre contre d’autres pauvres bougres qu’ils ne connaissaient pas, eux aussi arrachés à leurs usines et à leurs champs. En réalité ils ne sont pas morts pour des grands principes, ils sont morts pour satisfaire les appétits impérialistes d’une poignée de politiciens et remplir au passage les poches des industriels vendeurs d’armes !
Les mots « honneur », « gloire », « sacrifice », « courage », « mort pour la liberté/la patrie » ne sont là en réalité seulement pour masquer l’inutilité de tous ces morts, car on ne peut pas admettre que 18,6 millions de personnes ont perdu la vie pour rien…et malheureusement c’est le cas; tous ces gens sont morts en réalité pour rien à plus d’un titre :
La Première Guerre mondiale devait être la « Der des Ders », la dernière des dernières guerres, dont le degré de violence et de carnage encore jamais vu, aurait dû inciter les hommes à ne plus jamais se faire de guerre, 14/18 devait être « la guerre qui tue la guerre »….pourtant on connaît la suite: les 18,6 millions de morts n’incitèrent pas à « tuer la guerre », au contraire, il y a eu pire encore, 21 ans plus tard à peine et faisant cette fois-ci plus de 60 millions de morts et impactant directement cette fois-ci Nice. Une guerre ne tue pas une guerre, elle ne tue que des êtres humains.
Et en regardant aujourd’hui, avec le recul, à travers le prisme niçois, nous pouvons dire sans détour que les Niçois de l’époque sont allés se faire tuer pour rien quand on voit comment est traité notre Comté depuis…
« La Patrie reconnaissante », c’est la formule consacrée aujourd’hui. Si elle est « reconnaissante » sur le marbre des monuments aux morts, dans la vie de tous jours en revanche, cette patrie fait preuve d’une intolérable ingratitude :
Comment « la Patrie reconnaissante » (« Patrie » qui l’était seulement depuis 54 ans en 1914 et dans les conditions contestables que l’on connait) remerciera-t-elle les Nissart de 14/18 d’être allés se faire tuer loin de chez eux ? En privant leurs descendants de leurs droits, de leur langue, de leur histoire et de leurs terres.
« La Patrie reconnaissante » continue aujourd’hui de supprimer, au profit de Marseille, des institutions et des infrastructures du Comté. « La Patrie reconnaissante » avec la complicité des élus locaux, bétonnent ce coin de paradis que nos aïeux quittèrent pour n’en revenir qu’entre quatre planches !
En remerciement, des habitants de nos montagnes qui sont allés se faire tuer loin de leurs villages en 14/18, « la patrie reconnaissante » tue aujourd’hui les communes rurales; tue les vallées en supprimant école, service public de proximité, s’acharne sur les petites lignes de chemin de fer, s’acharne à dépouiller les descendants de ceux de 14/18 du pouvoir de décision et des moyens financiers des petites communes au profit des grandes métropoles !
La meilleure façon de leur rendre hommage de nos jours, histoire qu’ils ne soient pas morts pour rien, ce n’est pas juste de se contenter de se mettre bêtement au garde à vous devant les monuments aux morts une fois l’an :
C’est à plus grande échelle revenir aux fondamentaux de l’idéal européen, nés de deux guerres meurtrières, dont les technocrates et les politiciens d’aujourd’hui se sont largement éloignés. Et à notre échelle niçoise, se battre au quotidien pour permettre aux Niçois d’aujourd’hui de continuer de jouir de ce que leurs ancêtres ont construit, de permettre aux villages, que nos aïeux ont quittés pour ne jamais les revoir, de ne pas mourir eux aussi ! Le meilleur hommage qu’on puisse leur faire c’est de permettre à leurs descendants, toujours attachés à ces vallées de pouvoir continuer de vivre et travailler au pays et faire vivre nos villages et notre Comté !
édifiant!!
tres belle chronique
☆
noel