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Chronique souvenir Comment j’ai retrouvé la foi. Crounica souvenì « Couma ai retrouvat la fet »
Dernièrement, je vous avais fait cadeau d’un conte venant d’un auteur qui m’était inconnu. Il me semblait intéressant à publier. Mais aujourd’hui, ce sera une histoire vécue que je vais vous conter.
Notre dernier conte avait bien plu à notre ami Jean Louis Belon et il nous avais demandé de pouvoir le traduire en « lenga nouòstra » (*) pour faire travailler ses « escoulan » (*) lors des cours de niçois. C’est bien volontiers que nous avons accédé à sa demande (avec l’accord de l’administrateur du site). Et, aujourd’hui, cette collaboration continue avec ce conte édité dans les deux langues. Cela permettra à nos lecteurs qui n’ont pas la chance de posséder notre langue de se perfectionner avec celle-ci.
C’était un jour maudit, un jour où je venais de casser un bibelot à ma mère, une œuvre d’art en biscuit de Sèvre qui lui venait de sa grand-mère et qui représentait une danseuse de la belle époque.
Suite à une maladresse, je venais de la transformer en la vénus de Milou, c’est la même chose que celle de Milo mais avec la tête en moins.
Bref, je ramasse les bouts et je descends au garage, en espérant y trouver un tube de colle.
Après quelques recherches, au fond d’un tiroir, je trouve un vieux tube déjà entamé de cyanolite.
La colle miracle qui colle tout instantanément.
Hélas, le bouchon devait l’être depuis un certain temps, voire un temps certain.
J’essaye de le dévisser à la pince, de le chauffer légèrement avec un briquet, mais il préfère fondre que de céder.
Qu’à cela ne tienne, à l’aide d’une petite pointe et d’un marteau, je pratique un petit trou dans le haut du tube, apparemment une goutte du précieux liquide miraculeux apparait.
Mais j’ai beau presser, rien d’autre ne vient.
C’est alors que je décide d’employer la force brutale et bestiale.
Je mets le tube entre mes mains jointes, et je l’écrase entre les paumes de mes mains.
Et à ce moment là, le tube explose, répandant du liquide dans mes mains et quelques gouttes sur mes lèvres fermées. En quelques secondes, je me retrouve les mains collées dans la position du moine prieur et la bouche cousue.
Seul moyen de m’en sortir, trouver une pharmacie ouverte, qui disposera du dissolvant approprié.
La première pharmacie est quand même à huit minutes de marche de chez moi.
C’est ainsi que les mains jointes, je descends la rue, y croisant au passage quelques personnes qui me regardent étrangement, je ne porte effectivement ni robe de bure, ni tonsure.
Enfin, j’arrive à la pharmacie, mince, elle est fermée, sur la porte un petit écriteau : La pharmacie est fermée. Pharmacie de garde- Poste de Cimiez, Bd de Cimiez.
C’est que ce n’est pas la porte à côté, et dans ma position, je ne peux même pas prendre le bus.
Pourtant c’est le début de l’hiver et en chemisette, je commence à grelotter.
En avant pour une nouvelle marche, cette fois c’est vingt cinq minutes, enfin, ça descend.
C’est que je commence à baliser, la Cyanolite, c’est proche de cyanure, c’est un poison.
Enfin, la colle n’a pas du pénétrer dans ma bouche, je peux tourner et retourner ma langue.
Le long du chemin, je me met à chantonner en murmurant un chant religieux : « Je crois en toi, mon dieu, je heu crois en toi. »
Ce qui intrigue encore plus les gens que je croise ou que je double, car la peur me fait accélérer le pas.
Une âme généreuse, m’interpelle : « Vous avez un problème, un malaise jeune homme. »
Je ne peux que lui répondre : « Meuh, heu, meuh » en tendant mes mains jointes dans sa direction.
Ils se tourne alors vers sa femme qui tenait un petit chien en laisse : « Si ce n’est pas malheureux, à son âge, handicapé et muet. ».
Il me flatte la tête et glisse quelques choses dans la poche de mon pantalon.
Enfin, la lumière de l’enseigne clignotante de la pharmacie m’apparait un peu comme les feux de la vedette de secours pour le naufragé.
Il y a la queue à la pharmacie, sagement j’attends mon tour et enfin j’arrive devant le comptoir.
Et soudain, je me mets à pleurer, tendant toujours mes mains jointes et essayant de me faire comprendre.
Le pharmacien appelle sa vendeuse : « Marylène, pourriez-vous venir voir ce jeune homme. Je ne comprends rien de ce qu’il veut me dire. »
Enfin la communication passe, avec ma tête et mes yeux, je lui fais comprendre d’examiner mes mains.
Elle me prends les mains et essaye de les séparer et soudain comprend : « Mais c’est terrible, il a les mains collées »
L’espoir renait, je vais être délivré, un regard de reconnaissance éclaire mes yeux. J’en serais presque à chanter : « Ma, ma, ma, ma, Marylène. » chanson à la mode à cette époque.
– « On ne peut rien faire, Marylène, c’est une intervention délicate » dit le pharmacien.
Le monde s’écroule, la vedette est passée sans me voir. Je n’ai plus qu’à me laisser couler.
– « Il faudrait qu’il aille voir le docteur. » Persiste t’il.
– « Ce n’est pas loin, vous ressortez de la pharmacie, c’est la seconde porte à droite en longeant l’immeuble. » m’annonce tout sourire Marylène.
Je sors de la pharmacie, je trouve la bonne porte où se situe la plaque Docteur 1er étage. Heureusement mes mains jointes ne m’empêchent pas de presser le bouton de la sonnette, la porte s’ouvre. Je monte dare, dare, deux séries d’escalier, une plaque lumineuse indique, pour rentrer poussez la porte. Sésame s’ouvre sans difficulté, et je pénètre dans la salle d’attente ou se trouvent déjà quatre futurs patients assis et plongés dans les lectures de la presse magazine dont les pages transpirent diverses pathologies.
Une porte s’ouvre et le docteur en blouse blanche, tel un ange apparait, je m’apprête à lui faire a nouveau mon triste numéro.
Et là il me regarde et me dit : « Ah, c’est vous l’urgence, le monsieur collé, la pharmacie m’a téléphoné »
Je le suis chantonnant : « Ma, ma ,ma, ma, Marylène. Tu es ma reine. » faudra que je lui apporte des fleurs.
Avec des cotons tige et divers produits, il commença à me décoller les lèvres.
Il profita de mes nouvelles capacités d’élocutions pour me demander ce qui m’était arrivé.
Il tentait de conserver son sérieux, mais je sentais bien qu’il se retenait de pouffer de rire.
Enfin, il me fit assoir dans une autre pièce et me demanda de tremper mes mains dans une bassine contenant un liquide froid. Au bout de vingt minutes, je parvenais petit à petit à décoller mes mains.
Une fois délivré, mes mains nettoyées, je lui demandais : « je vous dois combien Docteur, car je suis parti de chez-moi, sans rien. »
– « Vous ne me devez rien, une histoire, comme ça à raconter, ça vaut bien le prix d’une consultation. »
Je le remerciais et parti toutefois un peu vexé. Il faisait nuit, la pharmacie avait fermée, et je n’avais plus qu’à remonter à pied jusqu’à chez moi.
Je mis machinalement, la main dans ma poche et y trouvais un billet de dix francs, un ange s’était penché sur mon malheur et je pouvais remonter en bus.
Les meilleures histoires sont celles que l’on n’invente pas.
Barbajouan. (Jean Marc Fonseca)
Èra un jou maladit, un jou que venìi de roumpre una babiola de ma maire, un’obra d’art en besquech de Sèvre que la tenìa de sa maigran e que rapresentava una balarina de la bell’epoca. Seguimen à una coufa, venìi de la trasfourmà en la Venus da Milou, es la mema caua qu’aquela de Milo mà en mai d’acò sensa testa.
Per la fà courta, rabalhi lu bout e m’en cali au garage, esperènt lì trouvà un tubou de cianolite. La pega miraculouha qu’impega tout sus lou còu.
Ailas, lou tap devìa l’estre despi un moumen, veire un bouòn moumen.
Provi de lou desvità à la pinça, de l’escaufa laugieramen émb’un esquié, mà li plas demai foundre que crida ceba.
Ni una ni doui, mé l’ajuda d’una pouncheta e d’un martèu, fau un pichin trauc en lou aut dóu tubou, aparentamen un degout dóu precious liquide miraculous pareisse.
Mà ai bèu esquissà, ren d’autre vòu venì.
Dóu còu decidi d’emplegà la fouòrça brutala e bestiala.
Mèti lou tubou tra li mieu man jounchi, e l’esquissi mentre li pauma de li mieu man.
En aquestou moumen d’aquì, lou tubou esplosa, espalancant dóu liquide en li mieu man e quauqui degout sus dai mieu labra fermadi. En quauqui segounda, m’aretrovi man empegadi en la pousicioun dóu padre pregaire e la bouca courdurada.
Souleta caua per m’en sourtì, trouvà una farmacìa duberta, que aurà de dissoulvènt adatat.
La premièra farmacìa es mina de ren à vuèch minuta à pen dau mieu.
E es coum’acò que li man jounchi, cali carrièra, lì rescountrant au passage quauqui persouna que mi regàjon bisaramen, noun ai pura de ròba de bura, ni de chélica.
Fin finala, arribi à la farmacìa, guigna, es clavada, sus la pouòrta un pichin escritèu : La farmacìa noun es duberta. Farmacìa de garda – Posta de Cimié, Boulevar de Cimié.
Noun es la pouòrta da coustà, e en la mieu pousicioun, pouòdi mancou pilhà lou car.
Epura es la debuta de l’iver e en camieta, coumensi à tremoulà.
Avanti per una nova caminada, ’stou cau serà vint-à-cinq minuta, enfin, s’en calà.
Es que coumensi d’avé la petouira, la Cyanolite, es proch dóu cianure, es un pouison.
Pura, la pega noun a pouscut intrà en la mieu bouca, pouòdi virà e viroulà la mieu lenga.
Lou lonc dóu camin, mi mèti à cantarelà en mourmouirant un cant religious : « crèsi en tu, Bouòn Dieu, heu…crèsi en tu », cen que entriga lou demai li gent que crousi o que doubli, que la pau mi fa achelerà lou pas.
Un’ànima generouha m’interpela : « avès un proublème, vi sentès pas ben, jouinome. »
Noun lì pouòdi respouòndre : « Meuh, heu, meuh » en pourgènt li man jounchi en la sieu direcioun.
Si revira aloura devers la sieu frema que tenìa un cagnotou à l’estaca : « S’es pas malerous, au sieu age, destropiat e mut ! ».
Mi flata la testa e mète en douça quauquaren en la bournièra dei mieu braia.
Enfin, lou lume de l’enseigna que fà pluguet de la farmacìa m’apareisse un pau couma lu fuèc de la vedeta de secours per lu naufragat.
Lì a couha à la farmacìa, bravamen aspèri lou mieu tour e finalamen arribi davant la banca.
E tout en un còu, mi mèti da plourà, pouòrgènt toujoù li mieu man jounchi e prouvant de mi faire acapì.
Lou bouticaire souòna la sieu vendairis : « Marilèna, poudès venì veire aquestou jouinome, capissi ren de cen que mi vòu dire. »
Enfin la coumunicacioun passa, e mé la mieu testa e lu mieu uès, lì fau capì d’esaminà li mieu man.
Mi pilha li man e prouva de li desseparà e da ret acapisse : « Mà es terrible, à li man pegadi »
L’esper renaisse, vau estre delieurat, un regart de recounouissença esclara lu mieu uès. N’en serìa scasi à cantà : « Ma, ma, ma, ma, Marylène. » canson de moda à l’epoca.
– « Pouden ren lì faire, Marilèna, es un’intervencioun delicata » di lou bouticaire.
Lou mounde si prefounda, la vedeta es passada sensa mi veire. Ai pu que da mi laissà coulà.
– Caurìa qu’anesse veire lou doutour. » que persista.
– Noun es luèn, ressourtès de la farmacìa, es la segounda pouòrta à drecha au lonc de l’immuble. » m’anounça tout sourire Marilèna.
Souòrti de la farmacìa, trovi la bouòna pouòrta doun si situa la placa « Doutour premié plan ». Urouhamen li mieu man jounchi noun m’empedìsson d’esquissà lou boutoun de la campaneta, la pouòrta si duèrba. Mounti leu-leu, doui serìa d’escalinada, una placa luminouha endica : per intrà poussas la pouòrta. Sésame si duèrbe sensa cruci, e ientri en la salla d’aspèra doun lì soun jà quatre futur pacient assetat o ploungeat en de letura de libret de pressa que li pagina sùdon diversi patoulougìa.
Una pouòrta si duèrbe e lou médicou en bloda blanca, tau un ange apareisse, mi prepari à li faire enca’n còu lou mieu triste numero.
E aqui mi regaja e mi di : « Ah, sias vous l’urgença, lou moussu pegat, la farmacìa m’a telefounat »
Lou segui cantarelant : « Ma, ma, ma, ma, Marilèna, tu es ma rei..ène. » caurà que li pouòrti de flou.
Mé de cotons tiges e divers produch, coumensa à mi desempegà li labra.
Proufitèt dei mieu novi capacità de charaìssa per mi demandà cen que m’èra aribat.
Prouvava de counserva lou sieu serious, mà sentìi ben que si retenìa de s’escracagna dóu rire.
Enfin, mi faguèt assetà en un’autra peça e mi demandèt de trempà li mieu man en una bassina countenènt un liquide frei. Au bout de vinta minuta, pervenìi pichin à pichin à despegà li mieu man.
Un còu delieurat, li mieu man netejadi, li demandèri : « Quant vous dèvi Doutour, que sieu partit dau mieu, sensa ren ? »
– Mi devès ren, un’istoria ensinda da cuntà, vau ben lou près d’una counsultacioun.
Lou remercièri e m’en anèri toutun un pòu mourtificat. Fahìa nuèch, la farmacìa avìa fermat, e n’avìi pu que da remountà à pen fin au mieu.
Metèri sensa lou voulé man en pocha e lì trouvèri un bilhet de des francs, un ange s’èra clinat sus lou mieu malur e poudèri remountà en car.
Li pu bouòni istoria soun aqueli que noun s’invanton.
Revirada da Jean Louis Bellon
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lenga nouòstra = notre langue (le nissart)
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escoulan: élèves